mardi 30 juin 2020

Ce que j'ai fait (et n'ai pas fait) durant le confinement

Le confinement j'y suis entré sans rien attendre, lui qui a moins motivé chez moi l'écriture que la lecture. Depuis quelques semaines, très souvent je dors le jour et lis la nuit, question de me dérober au chaos actuel (jamais aimé la cassette « ça va bien aller »). Cuisinant à peine, me douchant un jour sur deux, je lis et lis, et j'aime ça. Et parfois, entre Charles Dantzig, Fernando Pessoa et Annie Leclerc, j'écris des notes dans mon journal. 


Si j'écris peu, c'est surtout parce qu'il n'y a ni café ni bistro où je peux m'attabler. La fermeture de ces lieux, qui sont pour moi comme une sorte de paradis terrestre, figure comme l'ablation de mon écritoire. 

Chaque jour, confiné dans mon appartement, je téléphone à un ami. C'est ma façon de montrer de la solidarité à ce monde de solitudes. Le temps de quelques conversations, je lui raconte des blagues, ma journée, et nous partageons quelques calembours. Il écoute si bien que le soir je n'ai ni la force ni l'envie d'écrire. Étrange, cette sensation de n'avoir plus besoin de se confier à son journal, moi qui, depuis si longtemps (1994) ai recours à lui. Nos conversations quotidiennes avec l'ami engendrent le malheur suivant : j'y prends goût. La vie ne peut être parfaite à ce point. 


Journal, mot passe-partout, mot de tous les vents, qui n'est compris que par ceux qui en tiennent un. Le journal, lâcheté de l'écrivain pour certains, exemple de détermination et de discipline pour d'autres, est parfois ce que l'écrivain a accompli de plus grand : Kafka, Gombrowics, Anaïs Nin, Rousseau (Confessions). J'aimerais faire un livre sur le sujet.


Quelques mois avant la pandémie, j'avais commencé à acheter des livres en quantité. Je voulais remplir mes murs de livres, au point de n'avoir qu'à allonger le bras pour saisir l'ouvrage désiré, de Cervantès à Schopenhauer en passant par Asimov. Aux premiers jours du confinement, j'ai compris pourquoi tous ces livres. 


Le mois dernier, lorsque la librairie le Port-de-Tête a annoncé sa réouverture, j'y suis retourné, à ce royaume au halo sombre et clair de l'avenue du Mont-Royal. Au premier tour, j'y serais resté des heures, si ce n'est que, mesures sanitaires obligent, on fermait plus tôt (18 h au lieu de 22 h). Heureusement qu'elle ferme la nuit, je ne dormirais plus.


Pendant le confinement, de vieux amis sont revenus, d'autres se sont éloignés. Tout confinement purifie, clarifie, suggère. Les plus sensibles y reconnaissent une dose supplémentaire de lucidité. D'un cas l'autre, la solitude devient renfort ou souffrance. 

Je n'ai pas dévoré que des livres, mais aussi des kilomètres : Vieux-Québec, Joliette, Mont-Tremblant, Baie-Saint-Paul (où j'ai campé dans ma voiture), Farnham, Sherbrooke, Trois-Rivières, Île d'Orléans, Saint-Jean-sur-Richelieu.


En visite chez moi, une amie empoigne mon édition de poche de 2666 de Roberto Bolaño; 1020 pages bien serrées comme des vermicelles dans leur boîte. 


— C'est presque irrespectueux, un livre si épais.
— L'artiste véritable est tout sauf respectueux.


L'amour requiert beaucoup d'espace. Ça tombe bien, de plus en plus je sens mon coeur s'ouvrir. 

3 commentaires:

Marie a dit...

Tu n'as pas perdu l'essentiel Claudio, ta sensibilité. Ta prise de la réalité pleine d"acuité. Merci pour tes mots, ils éclairent ce que plusieurs d'entre nous, qui lisont et vivons la vie, ont traversé,

Claudio Pinto a dit...

Ah chère Marie, tes mots sont comme ton activisme : sincères et élevants.
merci d'être là.

SonnerieFrance a dit...

SonnerieFrance.com est un site internet proposant des sonneries mobiles. Avec 2021 des sonneries très attrayantes et originales, nous pouvons les rechercher partout sur les moteurs de recherche. SonnerieFrance.com propose des morceaux de musique gratuits qui s'adressent aux utilisateurs mobiles qui aiment les sonneries.